Le désastre
des implants Vitek |
Le scandale de toute cette affaire vient du fait que les implants
Proplast Vitek fabriqués à base de Téflon®
n’auraient jamais dû être mis sur le marché.
Dans les années 1980, les disques inter-articulaires étaient
principalement produit par Vitek à Houston au Texas et Dow
Corning à Midland dans le Michigan.
Dans les années 1983-1990, environ 26000 personnes ont reçu
des implants Vitek aux U.S.A. Pour la Suisse et la France, je n’ai
trouvé aucune information relatant le nombre d’implants
Vitek posés.
Les disques interpositionnels de remplacement (connus en anglais
sous le nom de IPIs) de Vitek étaient fabriqués avec
du Téflon®-Proplast. Le Proplast, développé
par le Dr Charles Homsy, dans le cadre de la firme international
DuPont, était constitué de Téflon® et de
carbone. Par la suite le carbone a été remplacé
par de l’oxyde d’aluminium et le produit pris le nom
de Proplast II. Ces implants ont été vendus par Vitek,
une compagnie dévellopée par le Dr Homsy, de 1983
à 1988, moment auquel ils furent retirés du marché.
Vitek fabriqua d’autres implants, appelés VK-I et VK-II,
qui se composaient du condyle et d’une prothèse de
la fosse glénoïde. Le Dr John Kent du Louisianna State
University Medical Center contribua à la conceptualisation
de ces prothèses.
Les patients et de nombreux chirurgiens orthopédistes sont
surpris de la commercialisation de ces produits. En effet, les problèmes
liés aux prothèses en Téflon® avaient déjà
été rapportés en 1963 par Sir John Charnley,
le chirurgien qui posa les premières prothèses de
hanche en Téflon®. Sir John Charnley raconte qu’ils
« lui a fallu pratiquer environ 300 opérations et attendre
3 à 4 ans avant de se rendre compte que le Téflon®
n’était pas un matériau approprié pour
le remplacement des articulations. Le Téflon® se montre
inapproprié autant par sa faible résistance à
l’usure que par la réaction de rejet des tissus créée
par les débris lorsque la prothèse se casse. »
En 1983, Vitek reçut l’approbation de vente de ses
implants par la « Food and Drug Administration » (FDA),
l’organe national américain qui contrôle la sécurité
des médicaments et matériaux médicaux mis sur
le marché. Au même moment, le Dr John Kent, conseiller
médical du Dr Homsy, découvrait les premiers problèmes
liés aux implants en Téflon®.
Le 14 février 1984, le Dr Kent parle au Dr Homsy «
d’une calamité aux proportions incroyables »
en se basant sur la destruction massive de l’articulation
générée par l’implant chez un de ses
patients.
En 1985, les problèmes liés aux prothèses furent
diffusés à un plus large public. Dorian Ryan, dans
une lettre d’information du Medical College du Wisconsin,
rapporte que leur « expérience (durant les 5 dernières
années) avec les implants en Proplast / Téflon®
n’est pas favorable. Nous avons constaté de nombreuses
destructions du condyle »
En avril 1986, la FDA reçut les premiers rapports de plainte
concernant les implants temporo-mandibulaires Vitek.
Aucune expérimentation animale avec des implants en PTFE
n’a été effectuée avant l’approbation
de ce matériel par la FDA en 1983.
La première étude fut pratiquée sur des chiens
en 1984.
El Deeb, à l’université du Minesota, étudia
le résultat de la pose de prothèse temporo-mandibulaire
Proplast sur des singes. Ces résultats, rapportés
lors du meeting annuel de l’Association Américaine
de Chirurgie maxillo-facial en octobre 1986, relevaient que «
les implants se cassaient et créaient chez les singes des
réactions immunitaires à cellules géantes ».
En juin 1986, Timmis rapportait aussi la présence de réactions
à cellules géantes chez des lapins à qui l’on
avait posé des implants Proplast / Téflon.
Le 20 février 1987, les chirurgiens de l’U.S. Air
Force stoppent l’utilisation des implants Proplast / Vitek
après avoir signalé à la FDA et à Vitek
que des patients, chez qui ils ont implanté des prothèses
en Téflon® ont de graves problèmes. Ils relèvent
« d’importantes réactions à cellules géantes,
douloureuses ou non, et une destruction du condyle et de la fosse
glénoïde ». D’ailleurs, certains patients
ont subi une perforation de la boîte crânienne avec
pénétration de la mandibule dans le cerveau.
Le 1er mai 1987, Vitek est poursuivi pour la 1er fois en justice
par des patients et finit par retirer du marché ces prothèses
interpositionnelles (IPI’s) en juin 1988.
Sur pression de la FDA, Vitek commence à avertir les médecins
du risque de fragmentation de ses implants.
Le nombre de plaintes augmentant, Vitek se met en faillite le 7
juin 1990.
Mise en cause par Vitek, la FDA commence une série d’action
incluant une mise en garde aux patients et aux chirurgiens maxillo-faciaux
contre les effets nocifs des implants Vitek. De plus, la FDA retire
son approbation des implants Vitek.
En juin 1992, tous les implants de Novamed and Oral Surgery Marketing,
société partenaire de Vitek, furent saisis par la
FDA., écrasés par un bulldozer et enterrés
dans un dépotoir à Houston au Texas.
Environ 2200 plaintes ont été déposées
contre Vitek par des patients cherchant des fonds pour poursuivre
un traitement médical permettant de retirer ces prothèses
et soigner les dégâts causés.
Face aux moyens limités de Vitek, mis en faillite, certains
patients se sont retournés contre DuPont qui avait fourni
le Téflon® pour Vitek. DuPont fut poursuivi pour dommage
et intérêts pour les dépenses médicales
de patients ayant reçu des implants en Téflon®.
Suite à cela, de nombreux patients ont eu leurs prothèses
retirées. Malheureusement, du fait de la présence
de microparticules de Téflon® dans les os, les réactions
inflammatoires à cellules géantes continuent de même
que la destruction des os du crâne et de la mandibule.
Toute cette affaire a amené la FDA à considérer
désormais les implants temporo-mandibulaires comme du matériel
de classe III, c'est-à-dire à haut risque. Cela signifie
que toute prothèse de ce type doit maintenant subir des tests
sur plusieurs années avant d’être commercialisée.
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